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Produire des documents de cours pour dyslexiques à l’aide de Scribus

La dyslexie est un trouble qui toucherait entre 5% et 15% des enfants. Les initiatives visant à mieux prendre en charge ces enfants au cours de leur scolarité tendent à se multiplier ces dernières années, notamment en apportant des solutions pédagogiques adaptées favorisant largement la réussite scolaire et l’intégration sociale.

Parallèlement à ces leviers pédagogiques, diverses études scientifiques tentent (ou ont tenté) de trouver des solutions pour faciliter la lecture aux dyslexiques, aussi bien du point de vue de la vitesse de lecture que de la compréhension du texte. Une étude a révélé il y a quelques jours, qu’un espacement plus important entre les lettres permettait aux enfants dyslexiques de lire plus vite et en faisant moins de fautes.

On peut également mentionner les conventions de plus en plus utilisées pour rendre les sites Web ergonomiques et lisibles par le plus grand nombre, notamment en aérant davantage les différentes parties d’un texte (parties, sous-parties, paragraphes…) et en ne justifiant pas celui-ci (aligné à droite et à gauche). Quelques unes de ces « bonnes pratiques » sont par exemple décrites ici. Certaines de ces conventions peuvent tout à fait être appliquées à des documents écrits, et c’est d’ailleurs ce que l’on retrouve dans les livres adaptés aux dyslexiques que proposent certains éditeurs, comme ici, ou bien encore là.

Dans un cadre scolaire, il reste encore à appliquer ces pratiques. Lorsqu’un polycopié est distribué aux élèves d’une classe, un enfant dyslexique pourrait profiter d’un support plus adapté à son handicap. Il n’est malheureusement pas évident pour un enseignant de produire un même document deux fois. Pour l’instant, les logiciels de traitement de texte ne permettent pas, à mon avis, de réaliser efficacement des espaces entre les caractères et les mots (la longueur entre les caractères est forcément constante), et encore moins de distinguer les lignes d’un paragraphe entre elles (un surlignage automatique d’une ligne sur deux par exemple). C’est en constatant cette dernière difficulté que j’ai eu l’idée d’utiliser un logiciel de PAO plutôt qu’un traitement de texte. La gestion des pages et des styles revenant à peu près au même que ce que l’on peut utiliser dans OpenOffice ou LibreOffice, et étant à la fois linuxien et libriste, mon choix s’est naturellement porté sur Scribus pour cela.

Version du document pour les non dyslexiques

A partir des analyses ci-dessus, on peut proposer un modèle de document qui permet de réaliser un polycopié basique, lequel repose sur des styles de paragraphes communs, mais qui comprend également des styles de paragraphes alternatifs plus adaptés pour les élèves dyslexiques. Intéressons-nous d’abord aux styles communs. Ceux-ci sont utilisables directement depuis la fenêtre d’édition du texte, sur la colonne de gauche, en face de chacun des paragraphes (cf. l’illustration ci-dessous). Ils sont également accessibles depuis la fenêtre Propriétés en mode édition rapide du texte, mais à mon sens, ce sera moins pratique à l’usage… Cinq styles sont disponibles, mais rien n’empêche d’en créer de nouveaux :

  • Titre
  • Titre 1
  • Titre 2
  • Titre 3
  • Paragraphe (par défaut)

Il est à noter que la police de caractères choisie est DejaVu Sans, qui a pour avantage d’être très lisible, mais aussi libre et gratuite. Les styles et les polices sont bien-sûr modifiables selon les besoins et les envies de chacun, via le menu Edition > Styles de Scribus.

Styles de paragraphes pour les non dyslexiques
Styles de paragraphes pour les non dyslexiques

Le résultat est un document somme toute classique, où le texte est justifié, et où on peut distinguer les différentes parties. Il reste éventuellement à ajouter des images. Précisons également que le document a été créé avec le mode « texte automatique », qui consiste, pour Scribus, à insérer une grande zone de texte sur chaque nouvelle page ajoutée ; et cette zone de texte est directement liée à la précédente. Cela facilite l’écriture de cours et le « glissement » des paragraphes d’une page sur l’autre. Le meilleur moyen de comprendre ce que je raconte (ce qui pourra paraître extragalactique, je l’admets) reste encore de tester le fichier par soi-même… :mrgreen:

Document pour les non dyslexiques
Document pour les non dyslexiques

Version du document pour les dyslexiques

Intéressons-nous maintenant à notre document, cette fois-ci avec des styles adaptés aux dyslexiques. Chacun des styles porte un nom identique à celui sur lequel il se base, aussi retrouvons-nous les différents titres et le paragraphe, tous précédés du mot Dyslexies. Pour pouvoir adapter notre document, il faut alors changer chaque style en son équivalent pour dyslexique, ce qui ne sera pas trop laborieux pour un document de quelques pages seulement. A défaut d’un seul bouton pour tout changer, c’est mieux que rien… Pour les romans, laissez-moi seulement vous souhaiter bon courage !

Styles de paragraphes pour les dyslexiques
Styles de paragraphes pour les dyslexiques

Une fois les styles appliqués, notre document est sensiblement différent. Voici ce qui a changé :

  • La hauteur entre les lignes est plus importante. Pour être précis, la hauteur est constante, ce qui nous servira pour la prochaine étape.
  • Les caractères sont plus espacés dans les mots, y compris pour les titres non soulignés.
  • Les mots sont plus espacés entre eux. Les espaces sont d’ailleurs plus importants qu’entre les caractères, de façon à mieux détacher les mots.
  • Les paragraphes sont alignés à gauche et commencent par un alinéa.

NB : il n’y a pas d’espace entre les caractères des titres soulignés, car un défaut persistant me gênait. Un vide apparaît systématiquement entre la première et la deuxième lettres.

Document pour les dyslexiques
Document pour les dyslexiques

Cette première ébauche est peut-être déjà un pas en avant… Je n’en suis pas tout à fait certain personnellement, car je ne connais pas de dyslexique… D’ailleurs je ne suis même pas enseignant… Mais bon…

Distinction des lignes

Sur les recommandations de formateurs (du moins d’après ce que j’ai entendu dire), il est toutefois possible d’apporter un confort supplémentaire pour la lecture des paragraphes : les dyslexiques éprouvent parfois des difficultés à continuer leur lecture d’une ligne sur l’autre, et les confondent alors. Une astuce consiste donc à leur donner un repère visuel, classiquement en surlignant une ligne sur deux, afin qu’ils visualisent mieux les lignes du texte.

Passer par le mécanisme des styles est tout à fait impossible ici. En revanche, il est possible de dessiner des lignes de hauteur fixe, en fond de page, sur lesquelles le texte va s’afficher. Le tout étant que la hauteur de ces lignes soit identique à la hauteur des lignes de texte. C’est pour cette raison que j’ai fait le choix d’une hauteur de lignes constante, comme je le décrivais un peu plus haut pour les styles adaptés aux dyslexiques.

Pour ne pas avoir à dessiner sur chaque page ces fameuses lignes, l’utilisation des gabarits de Scribus est indispensable. Un tel gabarit est d’ores et déjà disponible dans mon fichier, il suffit de l’appliquer à la page courante via le menu Page > Appliquer un gabarit puis en sélectionnant le gabarit Dyslexiques.

Gabarit pour distinguer les lignes
Gabarit pour distinguer les lignes

La page affiche alors des lignes blanches alternées de lignes roses ou jaunes. Il sera sans doute bon de s’assurer de leur utilité (ou de leur possible amélioration) pour les dyslexiques, tout en sachant que leur utilisation dépendra forcément d’une impression en couleurs… Sinon, c’est retour au Stabilo® !

Document avec distinction des lignes
Document avec distinction des lignes

Convertir le document en modèle de document

Pour profiter du fichier d’exemple, et éviter de refaire constamment ces styles pour chaque nouveau document, le plus simple est d’en faire un modèle de document dans Scribus. De cette façon, lors de l’ouverture du logiciel, le modèle sera directement proposé dans la liste des modèles de documents, à partir de l’onglet Nouveau document à partir du modèle. Pour pouvoir enregistrer le fichier en tant que modèle de document, il suffit de le « préparer » (retirer les textes inutiles pour en faire une base de document vierge), puis de cliquer sur le menu Fichier > Enregistrer en tant que modèle, et enfin de suivre les étapes.

Comparaison entre les 3 documents
Comparaison entre les 3 documents

Télécharger le fichier

Puisque jusqu’ici il a été question d’un document d’exemple précis, voici le résultat une fois exporté en PDF depuis Scribus.

Enfin, plus important car c’est sur lui que repose ce long et ennuyeux article, voici le fichier Scribus compressé en ZIP. Une fois décompressé et ouvert dans le logiciel, vous aurez tout le loisir de vous familiariser avec, et peut-être aussi de le modifier. Après l’avoir adapté à vos besoins, il sera enfin temps de l’enregistrer en tant que modèle, comme suggéré un peu plus haut.

Réaliser un calendrier pêle-mêle

Les sites de développement photo sont monnaie courante, et tous proposent des calendriers. Ces calendriers, généralement basés sur des modèles pré-définis, peuvent être personnalisés avec les photos d’anniversaire de la petite dernière, ou bien avec les photos de vos dernières vacances à la neige (avant que vous ne les finissiez plâtré).

Pour les plus créatifs d’entre nous, il existe diverses façons de réaliser des calendriers. Je vous propose d’en découvrir une un peu originale. Ceux qui me connaissent se douteront que les outils utilisés seront exclusivement des logiciels libres, qui plus est multi-plateformes… à une toute petite exception près… Voici les logiciels dont nous aurons besoin :

  • La commande cal pour la génération de données calendaires. Bon, oui, je sais, il faut être linuxien pour aimer les lignes de commandes obscures… Mais essayez seulement d’obtenir un calendrier au format texte avec ouin-ouin ! Vous ne pouvez pas ? Dommage…
  • Scribus pour la personnalisation des mois. Cet excellent logiciel de PAO va nous permettre d’avoir des mois facilement mis en page grâce à la gestion des styles, et d’exporter les pages au format SVG pour une qualité irréprochable.
  • Fotowall pour la réalisation d’un pêle-mêle intégrant un mois du calendrier, ou pourquoi pas un calendrier complet. Un exemple sera donné pour chacun de ces cas.

Données calendaires au format texte

La chose essentielle pour réaliser un calendrier, ce sont les dates : mois, semaines, jours, numéro des jours dans le mois, etc. Pour pouvoir personnaliser entièrement un calendrier, il est hors de question de faire une copie d’écran du calendrier de votre environnement (KDE, Gnome, ouin-ouin…) ou de Sunbird ;  d’autant que cela ajouterait la nécessité de retoucher ces copies d’écran à l’aide de Gimp ou de Photoshop, donc non merci. Il faut impérativement disposer de ces données sous forme textuelle, et là je maîtrise personnellement deux façons de faire : soit je « m’amuse » à écrire les dates une à une 365 ou 366 fois, soit j’utilise la commande cal et là tout est largement plus simple. Voici ce que va nous donner cette commande magique sous GNU/Linux :

[benoit@localhost:~]$ cal -m 1 2010
janvier 2010
lu ma me je ve sa di
1 2 3
4 5 6 7 8 9 10
11 12 13 14 15 16 17
18 19 20 21 22 23 24
25 26 27 28 29 30 31

[benoit@localhost:~]$ cal -m 2 2010
février 2010
lu ma me je ve sa di
1 2 3 4 5 6 7
8 9 10 11 12 13 14
15 16 17 18 19 20 21
22 23 24 25 26 27 28

# puis 3, 4, 5, etc…
# le paramètre « -m » permettant d’avoir le lundi en premier et non le dimanche

Pour toute explication supplémentaire sur l’utilisation ô combien ésotérique de cal, RTFM :

[benoit@localhost:~]$ man cal

Si vous constatez que les mois sont en anglais, pas de panique, tapez ceci dans le terminal, puis exécutez de nouveau la commande cal :

[benoit@localhost:~]$ LANG=fr_FR

Personnalisation du calendrier avec Scribus

Nous ne prendrons pas le temps d’expliquer ce que permet de faire Scribus et comment il s’utilise. Les didacticiels sont très nombreux sur Internet, et plusieurs ouvrages sont également disponibles en librairie. Nous nous contenterons donc de préciser les paramètres les plus importants pour une bonne mise en page de nos mois.

Afin de conserver l’alignement vertical des jours, vous devrez obligatoirement utiliser une police de caractères à pas fixe. « A pas fixe » veut dire que la largeur des caractères, aussi bien lettres, chiffres, espace ou autres, sera toujours identique, ce qui n’est par exemple pas le cas de Times New Roman. Puisque le Libre est mon credo, je ne peux que vous inviter à utiliser la famille de polices de caractères DejaVu, également disponibles pour Windows. Dans notre cas, nous ferons donc appel à la fonte DejaVu Sans Mono. Tout le reste dans Scribus consistera à habiller nos différents mois. Pour vous embêter le moins possible, il est recommandé d’user et d’abuser des styles de paragraphes, notamment accessibles par la touche F3. De la même façon, utilisez les gabarits pour vous assurer d’avoir toujours le même rendu avec vos décorations, quel que soit le nombre de pages. Vous pouvez télécharger le fichier Scribus (compressé) de l’exemple ci-dessous : calendrier_2010.zip

Exemple de calendrier
Exemple de calendrier
Une fois que vos mois sont prêts, il ne vous reste plus qu’à les convertir en images SVG. Pour ce faire, dans Scribus c’est très facile : rendez-vous dans le menu Fichier > Exporter > Enregistrer en SVG pour enregistrer une à une vos pages, et c’est tout ! Si vous souhaitez éditer vos images, vous pourrez par exemple le faire à l’aide du génialissime Inkscape, qui est encore une fois un logiciel libre et multi-plateforme.

Réalisation du ou des pêle-mêles avec Fotowall

A ce stade, le plus gros du travail a été fait. Il ne vous reste plus qu’à réaliser vos pêle-mêles avec le très intuitif Fotowall, directement en y ajoutant vos fichiers SVG comme vous feriez avec vos photos. Voici trois exemples réalisés avec le calendrier ci-dessus.

Pêle-mêle mensuel avec des photos
Pêle-mêle mensuel avec des photos
Un premier calendrier annuel
Un premier calendrier annuel

Un second calendrier annuel
Un second calendrier annuel
Il ne vous reste plus qu’à faire preuve de créativité et d’expérimenter toutes les possibilités offertes par ces fabuleux logiciels qui, rappelons-le encore une fois, sont libres et multi-plateformes. Pour une excellente qualité d’image, n’oubliez pas d’exporter vos pêle-mêles dans des dimensions très importantes, par exemple en 8000 * 6000 pixels ! C’est mieux pour être développé sur du papier photo… 😉